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Retour de pèlerinage

Quel bien cela faisait de revenir dans les Laurentides sans devoir franchir les portes d’un hôpital, assister à des funérailles, ou vivre dans l’inquiétude de les savoir si malades. L’atmosphère était tout autre : empreinte de joie intérieure (car je les sentais si présents en moi, et bienveillants aussi) et de profonde détente. Saint-Sauveur et la rue principale ont conservé leur charme. La place devant l’église, l’église elle-même, le beau concert à l’église, la librairie ésotérique, les factoreries, les belles montagnes, les émotions fortes, les souvenirs ravivés, le temps suspendu… Tout me rappelait hier et le sentiment que tout n’était pas révolu. Dans l’autocar vers Saint-Jérôme, l’émotion m’a submergée à la vue de Bellefeuille. Tout s’est ravivé. Là où je marchais avec ma mère… j’étais présente, nous étions là… Lorsque j’ai vu la sortie d’autoroute… j’étais dans la voiture auprès d’elle, et j'éprouvais exactement ce que j’avais vécu à ce moment-là. Il en fut de même dans...

Ce qui est beau dans la neige
(temps du silence et de l'oubli)

« Qu'il neige, et toute une ville vit au ralenti, entrant comme en hibernation. Et cela devient un rythme naturel contre lequel nul ne songerait à s'élever (...).

Ce qui est beau également dans la neige, c'est la manière dont elle tombe sans discontinuer, pendant des jours entiers, tantôt en gros flocons, tantôt en rafales de givre glacé. Car, à contempler ces chutes qui semblent sans fin, on sent un calme étrange vous envahir. Comme si vous étiez vous-même recouvert, enseveli sous un lourd linceul de sommeil; comme si le temps cessait de s'écouler en vous projetant de manière horizontale vers demain et vers de nouveaux projets, et qu'à la place, cet épais manteau blanc qui coule doucement du ciel comme d'un immense sablier vous intégrait silencieusement dans un temps vertical qui, de toutes parts, vous entoure et vous enserre, en vous abstrayant du temps quotidien, en vous faisant plonger dans un « autre temps » immobile, où il n'y a pas de projet, pas de demain : rien, si ce n'est la blancheur immaculée de ce temps du silence et de l'oubli.

Ce qui est admirable également, c'est la qualité du silence ouaté qui se met soudain à recouvrir une ville et ses bruits habituels. Certes, le simple fait de regarder la neige tomber, sans fin, est déjà en soi une cure de silence, qui vous lave et vous purifie, en faisant oublier les problèmes et les milliers de pensées inutiles qui peuvent vous assaillir. »

– Christian Miquel, La quête de l'exil (Pratique de l'exil), Paris : L'Harmattan, 1996, p. 13-14