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Retour de pèlerinage

Quel bien cela faisait de revenir dans les Laurentides sans devoir franchir les portes d’un hôpital, assister à des funérailles, ou vivre dans l’inquiétude de les savoir si malades. L’atmosphère était tout autre : empreinte de joie intérieure (car je les sentais si présents en moi, et bienveillants aussi) et de profonde détente. Saint-Sauveur et la rue principale ont conservé leur charme. La place devant l’église, l’église elle-même, le beau concert à l’église, la librairie ésotérique, les factoreries, les belles montagnes, les émotions fortes, les souvenirs ravivés, le temps suspendu… Tout me rappelait hier et le sentiment que tout n’était pas révolu. Dans l’autocar vers Saint-Jérôme, l’émotion m’a submergée à la vue de Bellefeuille. Tout s’est ravivé. Là où je marchais avec ma mère… j’étais présente, nous étions là… Lorsque j’ai vu la sortie d’autoroute… j’étais dans la voiture auprès d’elle, et j'éprouvais exactement ce que j’avais vécu à ce moment-là. Il en fut de même dans...

La solitude

« Il est des êtres à qui la solitude est affreusement pénible. Je crois bien qu'elle l'est à tout le monde, seulement, selon les caractères divers des mentalités, la "solitude" revêt d'autres aspects.

Il est des gens qui ne peuvent souffrir la solitude physique. (...) C'est la mentalité du mouton qui ne peut vivre loin du troupeau. (...)

Il y en a qui souffrent de la solitude sentimentale, du manque d'amitié ou de tendresse, qui ont besoin qu'on s'occupe d'eux, qu'on les cajole. Les enfants sont dans ce cas ! Les petits et beaucoup de grands enfants aussi. (...)

Et puis il y a encore des gens à qui la solitude intellectuelle est insupportable. Je confesse ma faiblesse. Je suis du nombre. Ne pouvoir parler à personne d'études, de philosophie... supplice pénible. (...)

Et, au sommet de cette échelle, il y a les solitaires qui paraissent n'avoir besoin d'aucune compagnie. Eh bien, ce serait erreur de le croire. J'en connais quelques-uns de ceux-là qui vivent pendant des années dans des endroits presque inaccessibles, sans voir qui que ce soit. Leur solitude n'est qu'apparente. Leur esprit est un monde, un monde peuplé d'êtres-idées innombrables et leur caverne est un salon où l'on cause... où l'on cause même fort bien. »

– Alexandra David-Néel, Journal de voyage (t. 1) : Lettres à son mari, Paris : Librairie Plon, 1975, p. 363-365