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Retour de pèlerinage

Quel bien cela faisait de revenir dans les Laurentides sans devoir franchir les portes d’un hôpital, assister à des funérailles, ou vivre dans l’inquiétude de les savoir si malades. L’atmosphère était tout autre : empreinte de joie intérieure (car je les sentais si présents en moi, et bienveillants aussi) et de profonde détente. Saint-Sauveur et la rue principale ont conservé leur charme. La place devant l’église, l’église elle-même, le beau concert à l’église, la librairie ésotérique, les factoreries, les belles montagnes, les émotions fortes, les souvenirs ravivés, le temps suspendu… Tout me rappelait hier et le sentiment que tout n’était pas révolu. Dans l’autocar vers Saint-Jérôme, l’émotion m’a submergée à la vue de Bellefeuille. Tout s’est ravivé. Là où je marchais avec ma mère… j’étais présente, nous étions là… Lorsque j’ai vu la sortie d’autoroute… j’étais dans la voiture auprès d’elle, et j'éprouvais exactement ce que j’avais vécu à ce moment-là. Il en fut de même dans...

Rayon de novembre

« Comme Novembre est doux, ce matin, dans la brume...
Le soleil, entre deux nuages gris, s'allume
Et s'éteint comme sous la paupière un regard.
On dirait que l'Été rôde au loin, quelque part...
C'est son haleine qui voltige tiède et lente, —
Moins le parfum hier encore respiré, —
Dans le brouillard ténu de la ville bruyante;
Et c'est comme un retour de Septembre égaré...
Mais les arbres n'ont plus de feuilles; la lumière
N'y fait plus resplendir ses flammes coutumières,
Et la pensée en pleurs songe sur un tombeau...

C'est un jour condamné, comme un enfant trop beau,
Tardivement venu contre toute espérance,
Et qui meurt en laissant aux yeux sa souvenance.
Dans la procession des jours, jour attardé
Par le plaisir de s'être vu tant regardé,
Quand il passait joyeux par les champs à l'automne,
Derrière ses aînés graves et monotones.
Le voilà solitaire au seuil du rude hiver,
Insouciant, comme il marchait sur le sol vert!
Mais c'en est fait déjà de cette douceur grise:
Le soir prompt et la nuit, procédant par surprise,
Ont cueilli le beau jour vagabond qui riait.
Et l'enfant pâle meurt en l'infini muet... »

– Albert Lozeau, Oeuvres poétiques complètes, PUM, 2002, p. 198