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Retour de pèlerinage

Quel bien cela faisait de revenir dans les Laurentides sans devoir franchir les portes d’un hôpital, assister à des funérailles, ou vivre dans l’inquiétude de les savoir si malades. L’atmosphère était tout autre : empreinte de fébrilité, teintée d’une certaine tristesse, mais aussi d’une joie intérieure — car je les sentais si présents en moi, bienveillants — et d’une profonde détente. Saint-Sauveur et la rue principale ont conservé leur charme. La place devant l’église, l’église elle-même, le beau concert à l’église, la librairie ésotérique, les factoreries, les belles montagnes, les émotions fortes, les souvenirs ravivés, le temps suspendu… Tout me rappelait hier et le sentiment que tout n’était pas révolu. Dans l’autocar vers Saint-Jérôme, l’émotion m’a submergée à la vue de Bellefeuille. Tout s’est ravivé. Là où je marchais avec ma mère… j’étais présente, nous étions là… Lorsque j’ai vu la sortie d’autoroute… j’étais dans la voiture auprès d’elle, et j'éprouvais exactement ...

La conscience des manques

« Comme celle des vieux Inuits et des aînés de nos campagnes, la nostalgie que nous éprouvons d’un lieu et d’une époque mythiques est le signe d’un manque réel. La solidarité familiale et sociale nous manque; la dignité du travail nous manque; le lien avec la nature nous manque; le sentiment d’une histoire commune et de valeurs partagées nous manque. Nous aurions tort de rejeter ces sentiments comme passéistes : dans la conscience de ce manque et de ces pertes, il me semble y avoir la possibilité de regagner une partie de ce que nous avons perdu. Le retour en arrière n’est ni possible ni souhaitable. Mais s’il se trouvait, dans notre passé, des choses qui pourraient nous servir à sortir du présent clos qui nous enserre, nous aurions tort de ne pas y avoir recours. »

– Bernard Émond, Camarade, ferme ton poste et autres textes, Montréal : Lux Éditeur, 2017, p. 60