Art de la frugalité et de la volupté

« En matière d’alimentation, plus que dans d’autres domaines, il n’est pas très compliqué de retrouver les règles du bon sens : manger moins, ne consommer que des produits de qualité, cuisiner soi-même, prendre du temps et du plaisir à manger et, surtout, ne pas accorder à ces activités plus d’importance qu’elles n’en ont, en réalité. » (p. 18)

« C’est en ne mangeant que lorsqu’on a faim, et juste assez pour calmer cette faim qu’on peut trouver un équilibre. Mais, pour cela, encore faut-il ramener son estomac à sa taille normale et lui réapprendre à ressentir la faim et la satiété. Laisser au corps le temps de réclamer ! » (p. 26)

« Une vingtaine de minutes passées à mastiquer, ingurgiter, sont nécessaires afin que le cerveau envoie au corps le signal que celui-ci est rassasié. Afin de manger le moins possible pendant ces vingt minutes, l’astuce est de prendre de petites bouchées et de mâcher avec insistance (d’où l’importance de la nourriture « solide »). (p. 29)

« Aucun médecin ne peut réfuter le fait que c’est une alimentation variée et complète qui rétablit l’équilibre psychologique et physique. » (p. 29)

« La taille naturelle de l’estomac correspond à peu près à celle de notre poing. » (p. 35)

« Trop de contrôle aboutit à des excès. Or c’est à un rééquilibrage progressif qu’il faut procéder. Seule la souplesse, tel le bambou dans le vent, ne se brise jamais. La notion du « tout ou rien » est un comportement rigide, d’une fragilité dangereuse. » (p. 43)

« Les unités proposées par la nature sont parfaites : un œuf, une pomme de terre, une pomme... Pourquoi ne pas s’en accommoder et réduire le volume de notre alimentation ? » (p. 57)

« Plus on se remplit l’estomac, moins il travaille. Cet estomac est un serviteur fidèle mais enclin à la paresse. » (p. 60)

« C’est parce que ces proportions sont minimes qu’on les déguste d’autant mieux, lentement, bouchée par bouchée. Un plaisir qui fait oublier tout le reste : tracas, stress, chagrins. Car c’est cette lenteur à déguster le minimum nécessaire qui nous « remplit », nous aidant à renouer avec une partie fondamentale de nous-même - l’accord entre notre corps et notre esprit, nos besoins et nos désirs, le contrôle de soi et la sérénité qui en découle... » (p. 61)

« L’eau est la boisson la plus saine et la plus naturelle sur terre. C’est, après l’air, un élément vital. Aucun nectar, même le plus luxueux, n’égale sa valeur. C’est elle et elle seule que nous devrions boire quand nous avons soif. » (p. 69)

« Le thé, le café contiennent de la caféine et, contrairement à ce que l’on pense, ces substances utilisent l’eau du corps, le desséchant. Lorsque vous buvez de l’alcool, du café, du thé, assurez-vous de boire au moins la même quantité d’eau. » (p. 69)

« Pour manger beau, bon et sain et en faire un style de vie, il faut enrayer la monotonie et la morosité. » (p. 83)

« Préparer soi-même ce qui va nous nourrir est essentiel à notre équilibre non seulement physique mais mental. Outre le fait de retrouver sa propre autonomie, de faire des courses, de cuisiner, c’est prendre le temps de vivre, prendre soin de soi et des siens, renouveler son énergie et retrouver ses repères en cueillant le bonheur qu’on a à portée de main, c’est-à-dire chez soi. » (p. 90)

« En matière d’alimentation, la qualité est ce qui devrait primer. » (p. 97)

« Lorsque vous achetez, regardez les étiquettes : plus la liste des ingrédients est longue, moins ceux-ci sont naturels. » (p. 100)

« La règle de trois : une céréale, une protéine, un légume » (p. 101)

« Ne faites pas une fixation sur l’obligation de manger absolument « équilibré » chaque jour. Il s’agit là d’une autre contrainte. Notre organisme régule l’utilisation des aliments absorbés sur plusieurs jours, au besoin il les stocke - en particulier dans le foie, pour ce qui concerne les vitamines et les minéraux. » (p. 112)

« Seuls les fruits devraient être pris en dehors des repas pour assurer une bonne assimilation de leurs enzymes - les fruits rouges tels que les fraises, les baies ainsi que les fruits cuits peuvent être, eux, consommés avec d’autres types d’aliments. » (p. 113)

« On peut faire de ses repas des poèmes. De petits poèmes éclair qui nourrissent de tout ce qu’ils ne disent pas. » (p. 116)

« Pour manger peu, le seul impératif est de manger avec plaisir. Si vous grignotez quelques frites lentement, avec autant de concentration que possible, vous n’aurez pas perdu votre temps. » (p. 139)

« Plus que la nourriture, appréciez votre sagesse, votre retenue, votre détachement. Une fois que vous aurez compris qu’il n’y a rien de plus simple, vous vous étonnerez de ne pas l’avoir compris plus tôt. » (p. 147)

« Avec un corps trop peu entraîné, un œil insensible, une oreille non musicale, un palais grossier et des sens sous-développés, la vie a moins de piquant, elle est morne et triste. » (p. 150)

« Moins on « habille » un légume, un excellent poisson, une excellente grillade, plus on découvre de subtiles saveurs. » (p. 152)

« Vivre avec élégance signifie prendre son temps, rester centré, donner la priorité à un nombre restreint de choses afin de ne pas encombrer son esprit et sa vie. » (p. 154)

« Tout devrait être délicat dans ce qui touche à la nourriture - même lorsqu’on prend une seule tasse de café le matin. » (p. 155)

« Si les gens étaient davantage entourés de beauté, ils ressentiraient moins le besoin de consommer, de détruire, de gagner de l’argent à tout prix. » (p. 155)

« Pour que la nourriture soit correctement assimilée par le corps, elle doit être prise lentement, et dans un environnement agréable. » (p. 156)

« Partager un moment autour de quelques plats simples avec de vrais amis est un authentique bonheur. » (p. 165)

« Le repas prend une valeur de reconnaissance pour le temps et l’énergie que d’autres ont dépensés pour nous. » (p. 168)

« Les Chinois, les maîtres en « alimentation médicinale », pensent que celui qui veut prendre soin de sa santé doit être modéré dans ses goûts, bannir ses inquiétudes, tempérer ses désirs, réfréner ses émotions, prendre soin de sa force vitale, épargner ses paroles, considérer avec légèreté le succès ou l’insuccès, ignorer la tristesse ou les difficultés, éviter les grandes affections et les grandes haines, calmer ses yeux et ses oreilles, et être fidèle à son régime intérieur ; comment peut-il être malade, celui qui ne se fatigue pas l’esprit, ni ne trouble son âme ? » (p. 169)

« Pour certains, se nourrir de pain, de tomates et d’eau fraîche peut constituer un véritable festin. » (p. 170)

« Ne pas préserver les choses pour un avenir lointain, mais utiliser au mieux ce qu’il y a en soi chaque jour. » (« loi de Carver ») (p. 173)

« La nourriture (plus largement le régime) devrait avoir pour but de se concentrer en premier sur sa capacité à déployer et à conserver son potentiel vital. Pour cela, il ne faut plus s’embarrasser du monde entier, des choses, des soucis. Il faut devenir d’une indépendance absolue où le tumulte fait place à la placidité. » (p. 177)

« Pour obtenir cette sérénité, ce qu’il faut, c’est ne pas avoir de but, mais rester toujours aussi léger et alerte que possible, éviter torpeur et fixité, et surtout nourrir son équilibre (yin et yang) en évitant les pressions diverses. Or toujours se demander « pourquoi » chercher un sens à la vie, à son aboutissement, est considéré par les Orientaux comme une perte d’énergie. » (p. 178)

« Profiter des énergies de la nature, des arts, de l’amour, pour fortifier votre corps, votre esprit et votre cœur. » (p. 179)

« Restaurez vos forces au fur et à mesure que vous les dépensez, avivez vos capacités, aiguisez vos sens en épurant votre être physique de toutes ses lourdeurs et ses toxines. » (p. 180)

« Donnez la priorité au non-épuisement en vous détendant, en avivant la vie et en la renouvelant. C’est en parvenant à un état où l’on devient indépendant de tout, même du passé et du futur que l’on parvient à remplacer le tumulte par la placidité. Or c’est cette dernière qui nourrit la vie. Il faut non seulement nourrir sa vie organique, mais sa vie sensitive et spirituelle pour s’épanouir ; accéder à un degré plus élevé de sa conscience, s’animer et s’affranchir des torpeurs de l’esprit ainsi que de la bêtise. » (p. 180)

– Dominique Loreau, L’art de la frugalité et de la volupté, Paris : Laffont, 2009, 231 p.