Le bouddhisme zen (Alan Watts)

Alan Watts est un philosophe anglais (1915-1973) qui s'est intéressé à l'orientalisme. Il a été considéré comme un jeteur de pont entre l'Orient et l'Occident.

De l'un et de l'autre côté de la barricade, observateur objectif (doyen de l'Académie américaine des Études asiatiques en Californie) et disciple subjectif (initié au bouddhisme zen rinzai), il n'entrait pas en novice sur le terrain du bouddhisme zen.

Watts replace la doctrine zen dans son contexte culturel, la rendant de cette manière plus compréhensible, et même attrayante. Dans la première partie, il retrace les origines et le développement du bouddhisme zen, ses rapports avec le taoïsme chinois et le bouddhisme hindou, et, dans la deuxième partie, il s'attache aux principes et à la pratique. Ses sources d'informations sont de trois ordres : les ouvrages publiés dans les langues européennes, les documents chinois les plus importants et, finalement, des renseignements recueillis lors de rencontres personnelles.

L'auteur cite les patriarches et grands maîtres zen, garde un esprit critique (en abordant les problèmes de la discipline et de la structuration culturelle) et épouse une position amicalement neutre, ne se présentant pas comme un adepte de cette doctrine, ni comme un bouddhiste. Une intéressante partie sur le Zen et l'art. L'étude vient avec une bibliographie et des textes chinois.

Cette étude méthodique, objective et désintéressée est une bonne entrée en matière. Les idées fondamentales y sont. Pour n'en nommer que quelques-unes : la naturalité, la spontanéité, la désignation directe, l'orgueil de l'ego, l'illusion de la réalité de l'ego, l'illusion de la dissociation, la confusion des mots et des idées avec la réalité, l'autorégulation, la résistance mentale.

Pour une étude plus exhaustive, lire les trois volumes de D.T. Suzuki, même s'ils sont plus arides, ils font autorité. Et, pour goûter tout simplement la saveur de la doctrine zen, le livre exquis de l'autre Suzuki (Shunryu), Esprit zen, esprit neuf, touche l'essentiel dans un langage ordinaire.

Quelques extraits :

« Pour savoir ce qu'est le Zen, il n'y a pas d'autre moyen que de le pratiquer, de l'expérimenter concrètement, afin de découvrir ce que cèlent les mots. » (p. 10-11)

« Ce n'est ni une religion, ni une philosophie. Ce n'est ni une psychologie, ni une science. C'est un exemple de ce que l'on appelle... un "moyen de libération". » (p. 15)

« Selon le taoïsme et le zen, la base de l'activité mentale ne réside pas dans le processus de pensée conscient, ni dans l'ego. Lorsqu'un homme a appris à donner libre cours à son esprit de manière qu'il fonctionne selon le mode spontané et global qui lui est naturel, il fait preuve de cette "vertu" ou "faculté" spéciale que l'on appelle "te". (...) Le "te" représente une vertu à l'état pur, spontanée, que l'on ne peut développer ou imiter par l'application délibérée d'une méthode quelconque. » (p. 38-39)

« Le taoïsme est le mode de libération chinois primitif qui s'est amalgamé au bouddhisme mahayana hindou pour donner naissance au Zen. » (p. 41-42)

« Bien que le mot "zen" signifie "dhyana" ou "méditation”... son trait le plus spécifique est peut-être son accessibilité directe. (...) L'enseignement du Zen est sans détour, allant droit et ouvertement à la vérité sans jongler avec les symboles. » (p. 92-93)

« La vie zen commence au moment où il n'y a plus rien à poursuivre, plus rien à convoiter. » (p. 140)

« La position finale du Zen est qu'il ne se place d'aucun point de vue particulier, restant libre d'adopter celui qui convient le mieux dans telle ou telle circonstance. » (p. 186)

– Alan Watts, Le bouddhisme zen, Payot, 1991