Le Zen de Hui Neng (sixième patriarche)

« Hui Neng n'était pas quiétiste. Sa réaction n'était pas non plus activiste. Elle était cependant dynamique. Elle frayait un passage vers quelque chose de tout à fait original et neuf.

Il refusait de séparer la méditation comme moyen (dhyana) de l'illumination comme fin (prajna). Pour lui, elles étaient réellement inséparables et la discipline du Zen consistait à s'efforcer de réaliser l'intégration et l'unité de prajna et dhyana dans toutes les actions de l'intéressé, si extérieures, si banales et si insignifiantes qu'elles puissent être.

Pour Hui Neng, c'est toute la vie qui est le Zen. On ne pouvait pas trouver le Zen tout simplement en se détournant de la vie active pour s'absorber dans la méditation. Le Zen est la prise de conscience elle-même du dynamisme de la vie se vivant en nous et y étant consciente d'elle-même, comme d'une seule et même vie vivant en tous.

Selon Hui Neng, il n'y a rien à atteindre, et s'employer à trouver un « moyen » d'y parvenir n'est que se tromper soi-même. On « n'atteint » pas le Zen par une méditation essuyant un miroir, mais par l'oubli de soi dans le présent existentiel de la vie, telle qu'elle est concrètement. »

– Thomas Merton, Mystique et Zen, suivi de Journal d'Asie, traduit de l'anglais par C. Tunmer et Jean-Pierre Denis, Paris : Albin Michel, c1961, 1995, p. 40 et 45